Reprise de la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes 2017
Cannes, bis
Pour sa treizième édition de reprise de la Quinzaine des Réalisateurs, l’Alhambra s’offre une nouvelle fois l’intégralité de la sélection cannoise.
Créée à la fin des années 60, la Quinzaine des réalisateurs est le fruit d’une histoire tumultueuse. En ce mois de mai 1968, l’aristocratie du cinéma mondial se retrouve à Cannes, loin du tumulte des révoltes parisiennes. Pourtant, les vibrations du Quartier Latin vont rapidement contaminer la Croisette grâce à une poignée de cinéastes bien décidés à faire souffler le vent de l’insurrection au cœur de l’événement international. Obtenant l’arrêt du festival cette année-là, un quarteron de 180 réalisateurs, souvent issus de la Nouvelle Vague, las de l’académisme empesé de la sélection officielle, crée l’année suivante un « contre-festival » ayant pour but de promouvoir un cinéma tourné vers la liberté artistique et la diversité des cinématographies mondiales.
Depuis, les ambitions des deux festivals se sont entrelacées, et tandis que la compétition officielle s’est décontractée en s’ouvrant à toutes les cinématographies, la Quinzaine s’est institutionnalisée tout en restant fidèle au projet artistique de ses fondateurs. En effet, le festival, qui prend ses quartiers dans les méandres de l’Hôtel Marriott, reste un excellent dénicheur de chefs-d’œuvre, le flair des programmateurs se déclinant ensuite tout au long de l’année par les succès critiques et commerciaux de ses sélections. En témoigne l’édition 2016, qui a vu défiler, entre autres, le beau documentaire Les Vies de Thérèse de Sébastien Lifshitz, le merveilleux film d’animation Ma vie de Courgette de Claude Barras ou l’autobiographie psychédélico-poétique d’Alejandro Jodorovsky, Poésie sans fin.
C’est donc avec un plaisir non dissimulé que sitôt le Festival de Cannes terminé, on verra débarquer à l’Estaque l’intégralité de la sélection pour dix jours d’avant-premières et de rencontres à l’Alhambra. Déjà treize ans que le cinéma dirigé par William Benedetto propose aux Marseillais de profiter de cette sélection exceptionnelle en simultané avec le Forum des Images parisien. D’autant que, pour la deuxième fois, l’Alhambra a obtenu les droits sur la totalité de la programmation cannoise. Au programme, vingt longs métrages, dix courts, six soirées de rencontres avec les cinéastes et un ciné-philo avec Marc Rosmini autour d’une série B imaginant les États-Unis ravagés par une guerre civile, Bushwick de Cary Murnion et Jonathan Milott. On retiendra notamment une rencontre avec l’immense Claire Denis autour de son nouveau film, Un beau soleil intérieur, avec la lumineuse Juliette Binoche, Jeannette, ou l’enfance de Jeanne d’Arc revisitée par l’inclassable Bruno Dumont, ou encore le retour du grand Amos Gitaï avec un documentaire sur la Guerre de six jours et ses conséquences, West of the Jordan River (Field Diary revisited), présenté par Xavier Nataf en prélude au festival Regards sur le cinéma israélien.
Au final, un festival précieux qui permet de goûter avant tout le monde à la cinéphilie cannoise dans la convivialité, sans la foule hystérique, les files d’attentes interminables et l’ambiance ultra sécuritaire qui règnent actuellement sur la Côte d’Azur.
DC