Nostalgie de la lumière

Durant tout un week-end, la salle de cinéma du MuCEM, dirigée par Geneviève Houssay, invite l’immense cinéaste portugais Miguel Gomes pour une vaste rétrospective de son œuvre, parmi les plus sémillantes de la production cinématographique contemporaine.

Nous l’avons répété dans ces colonnes : parmi les grandes découvertes cinématographiques de l’année écoulée figure sans conteste la lumineuse trilogie du cinéaste portugais Miguel Gomes, Les Mille et une nuits, coproduite et distribuée par l’excellente structure, partiellement marseillaise, Shellac. Face à cette œuvre-somme, nous avons renoué avec l’essence même du cinéma, éloignée de l’idée européenne d’un naturalisme qui, loin de nous offrir une représentation du réel, comme elle en affiche le désir, établit aujourd’hui un ensemble de codes (voire de signes sémiotiques) qui s’éloignent sans le réinventer du geste cinématographique. Rien de tout cela chez Gomes. La poétique du langage le dispute aux trouvailles des formes, pour un cinéma intrinsèquement social (dans sa cosmogonie politique). Au-delà du désordre faussement apparent, la trilogie distille une représentation du monde onirique où chaque chose, si elle n’est pas à la place attendue, trouve à minima sa juste place. Sans se départir d’un fond mélancolique qui fait peu ou prou l’âme ­— au-delà des clichés — de la société portugaise. Après Tabou et Ce cher mois d’août, Miguel Gomes confirme bel et bien qu’il compte aujourd’hui parmi les plus grands réalisateurs en activité. L’équipe du cinéma du MuCEM exauce les vœux de tout cinéphile accompli : passer un week-end en compagnie du cinéaste portugais, suivi pour l’occasion du critique de Télérama Laurent Rigoulet et de la journaliste Maria José Oliveira. Une quasi intégrale des œuvres de Miguel Gomes permettra ainsi d’embrasser une filmographie puissante et exigeante, de la poignée de courts-métrages (à l’instar de Cantique des créatures ou Rédemption), jusqu’à l’ensemble des films longs (à commencer par La Gueule que tu mérites, son premier opus). Sans oublier, bien sûr, les trois volets de la trilogie des Mille et une nuits, projetés en continu pendant la journée du dimanche 24 janvier. L’occasion, en présence du réalisateur, d’offrir plusieurs regards sur le cinéma portugais contemporain.

Emmanuel Vigne

Rétrospective Miguel Gomes : du 22 au 24/01 au MuCEM (7 promenade Robert Laffont, 2^e).
Rens. : 04 84 35 13 13 / www.mucem.org

Programme complet de la rétrospective Miguel Gomes