Rouge décanté de Guy Cassiers © Pan Sok

Rouge décanté de Guy Cassiers au Théâtre Joliette-Minoterie

Vintage

 

Créée en 2004 et tirée de l’œuvre autobiographique de Jeroen Brouwers, la pièce de Guy Cassiers Rouge décanté nous était présentée fin janvier à la Minoterie. L’occasion de revenir sur ce qui tiraille le théâtre dans son appréhension et son devenir.

 

Ce qu’il y a de formidable dans le spectacle vivant, c’est cette interrogation sur ce que l’on a vu et notre désir de la partager avec un proche. Guy Cassiers, c’est un nom qui remplit la salle. La vidéo et les projections d’écran travaillent comme une signature chez le metteur en scène, reconnu dans les Flandres et révélé au début des années 90 après des études d’art graphique. Mais la complexité de l’image sert quoi ? Peut-être l’idée de démultiplier l’image de l’acteur pour mieux le désacraliser et se coller au plus près de ses émotions. Cependant, le théâtre n’échappe pas au temps qui passe, et la vidéo à l’heure du numérique ne possède plus le charme des premiers pas de Bill Viola ou Nam June Paik. Parlons maintenant du texte qui nous est offert. Une histoire sombre et violente d’un enfant regardant sa mère subir les sévices d’un camp de concentration japonais, pendant l’occupation de l’Indochine hollandaise. Rien n’est laissé au hasard : les viols, les meurtres à la baïonnette, la faim, les humiliations, le riz que l’on cache dans le soutien-gorge et la culotte. Le comédien, seul sur scène, déroule le texte de ces horreurs dans une situation de mémoire, fumant lentement, tantôt avachi, tantôt debout, à la manière du cliché de l’écrivain qui se souvient et tente de prolonger le fil de l’histoire. De cette horreur complexe, dès lors qu’elle s’organise à grande échelle, on aimerait que la simplicité vienne démêler le fil de l’histoire pour nous toucher au plus près. Mais c’est plutôt l’inverse qui se produit. On cherche à comprendre le pourquoi de ce flot d’images, les intentions d’un jeu d’acteur qui s’épuise dans la monotonie, comme si tout cela n’avait que peu d’importance, comme si tout cela n’avait jamais existé.

Karim Grandi-Baupain

 

Rouge décanté de Guy Cassiers était présenté du 29 au 31/01 au Théâtre Joliette-Minoterie.

Pour en (sa)voir plus: http://toneelhuis.be