Sami Trabelsi – Summertime à la Galerie Karima Célestin
Summer intime
Fraîchement arrivée sur la petite scène des galeries d’art contemporain à Marseille, Karima Célestin tente le syncrétisme entre deux visions du métier, l’une « à la parisienne » avec un certain raffinement, l’autre « à la marseillaise » en choisissant d’installer sa galerie rue Sénac. Deux mondes se trouvent enfin, pour le meilleur et pour le meilleur…
Ceux qui auront lu l’article Quand la Capitale juge la Capitalesauront quel regard les Templon, les Menour et les Vallois portent sur l’art contemporain à Marseille, qui se cantonnerait à un [mac] mourant et à un FRAC en construction ! Nier que l’art contemporain est porté dans notre ville par le travail des galeries privées relève soit d’une méconnaissance géographique, soit d’un snobisme absurde. Mais laissons là l’expression d’un parisianisme un peu âpre pour nous intéresser à une démarche qui semble à rebours. Une galeriste parisienne, Karima Célestin, a fait le chemin inverse, de la capitale vers Marseille, pour tenter l’expérience de l’art et non pas du commerce de l’art.
La relation complice entre Karima Célestin et l’artiste qu’elle met à l’honneur pour son entrée en 2013, Sami Trabelsi, est perceptible à la fois dans les mots de chacun et dans cette très belle exposition. Dans une scénographie sobre et efficace, le projet commun s’ancre sur le travail du jeune plasticien, attentif à « l’accident ». En témoigne l’accident lumineux dans une photo, première escale dans le travail de Sami Trabelsi, qui présente une série représentant l’appartement de son enfance. Autant de paysages d’intérieurs, privés de la présence humaine, suggérée par les gestes du départ. Dans Téléports, les chaises renversées rappellent celles bousculées par les danseurs de Pina Bausch dans Café Mülher. Dans la grande salle de la galerie, on s’interroge sur les mouvements des visages filmés en slow motion, presque imperceptibles, qui étirent le temps. Même sensation devant les deux vidéos, Saïdia, dont les images non fomentées par l’artiste captivent autant que les hanches de cette danseuse de hula hoop, et Portrait, dans laquelle se rejouent toutes les intrigues entre l’artiste et son modèle. Sami Trabelsi filme ses séances photos, prétextes à obtenir de ses modèles non pas le portrait qu’on croyait, mais les secondes intimes, personnelles, pendant lesquelles le modèle se prépare à offrir le meilleur de son image…
Les œuvres de Sami Trabelsi placent le regardeur dans une sorte d’impudeur. Ce dernier se fascine pour des visages déformés ou pour des moments d’intimité, de concentration, auxquels on n’a jamais accès. Il donne ainsi à voir « le off » des gens, ce que l’on ne veut pas montrer à l’autre. C’est l’être humain que l’on découvre ici, un être humain qui nous ressemble.
Céline Ghisleri
Sami Trabelsi – Summertime : jusqu’au 23/02 à la Galerie Karima Célestin (25 rue Sénac de Meilhan, 1er).
Rens. 06 28 72 44 24 / www.karimacelestin.com