Politiquement Schtroumpf !

Semaine de la Pop Philosophie

La sagesse au quotidien

 

A l’initiative des rencontres Place Publique, journalistes, chercheurs, professeurs et écrivains décortiquent pendant une semaine sous le prisme de la philosophie ce qui fait notre quotidien : la culture pop.

Bien sûr, vous connaissez Apple et les Schtroumpfs. Comme tout le monde. Et probablement, comme beaucoup, travaillez-vous dans une entreprise. Quand vous en sortez, il se peut que vous alliez faire vos courses, dans ce supermarché dont vous avez la carte de fidélité. Et, arrivé chez vous, vous vous adonnez à la pornographie, la drogue, la lecture de polars… A moins que vous ne préfériez écouter du rap, regarder du foot, de la téléréalité, frayer avec des vampires, Harry Potter ou encore Les Mystères de l’Ouest ? Et dans tout ça, vous pensez parfois que décidément, il est impossible d’échapper à l’actualité, à ce rythme effréné des médias de l’info… De ce quotidien, les Rencontres Place Publique en ont fait tout un programme, qui se décline depuis quatre saisons maintenant. Et pour fêter comme il se doit le cinquantième anniversaire de la pop (calé sur la sortie de l’album Love Me Do des Beatles), cette année verra se jouer une première dans le monde de la philo : la Nuit de la Pop Philosophie.

 Capucine Vignaux

 

Semaine de la Pop Philosophie : du 22 au 27/10 à Marseille.
Rens. www.semainedelapopphilosophie.fr

 

FOCUS

 

Politiquement Schtroumpf !

Les Schtroumpfs, Antoine Buéno les adorait quand il était petit. Depuis, il est devenu professeur à Sciences Po, où il donne un cours sur l’utopie. « L’utopie est une société parfaite abstraite… Les idéologies qui la mettent en place aboutissent au totalitarisme. » A partir de là, notre homme s’est « amusé à plaquer une grille de lecture extrêmement rigide et stéréotypée sur une œuvre pop », remarquant d’ailleurs « qu’on peut le faire à peu près avec tout. » Issue de son essai Le Petit Livre bleu et de sa pièce Politiquement Schtroumpf, sa conférence de pop philosophie prendra la forme d’une performance. Assisté de la Schtroumpfette, il expliquera avec un humour potache en quoi le Grand Schtroumpf tient du « petit père des peuples » ou pourquoi la Schtroumpfette a changé de couleur de cheveux. Il explorera également les figures de Gargamel ou encore du Schtroumpf à lunettes. Et, tout en « s’amusant », on comprendra ce « décalage entre notre imagerie collective et l’état conscient de notre mentalité. »

CV

« Le Village des Schtroumpfs, un archétype d’utopie totalitaire » : le 22/10 au TNM La Criée  (30 quai de Rive Neuve, 7e). 20h

 


 

Philosophie en entreprise

« On peut fabriquer un monde qui n’est pas nécessairement copié sur l’empire romain. »

Too big to fail, « aléa moral », risque démesuré, instabilité… Autant de notions, autant d’analyses dont on entend parler depuis 2008. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui voient dans la crise l’occasion à ne pas manquer, celle de satisfaire cette éternelle aspiration : « changer le monde ». Or « changer le monde », c’est aussi « changer l’entreprise ».
Philip Clark, consultant mais aussi vice-président de la Société vaudoise de Philosophie, a conçu avec Gabriel Dorthe le Projet Socrate, un moyen de faire entrer l’amour de la sagesse dans le monde du travail. L’intention ? Conduire l’entreprise à réinventer son organisation et sa vision, la première étant d’origine « militaire », la seconde « guerrière ». En effet, elle s’organise comme une « légion romaine », sous la forme d’une hiérarchie pyramidale. De même raisonne-t-elle en termes de « stratégie », d’objectifs à atteindre, de « combat à livrer ». Elle s’inscrit donc dans « un jeu fini », « un jeu à somme nulle », c’est-à-dire qui se solde par « un perdant et un gagnant ». Or, cette approche peut-elle être efficace dans un environnement qui a perdu toute stabilité, dans une économie où les prévisions sont mises en échec ? Philip Clark ne le pense pas et c’est pourquoi il invite les entreprises à penser un « jeu infini », où le « stratagème » prend la place de la stratégie. Le but ? « Jouer le plus longtemps possible. » Le moyen ? Réinventer sans cesse « les règles du jeu ». « L’approche économique d’une entreprise doit être celle de l’expérimentation et de l’open source. » Il faut donc quitter cette posture qui consiste à « envisager le futur comme une réplication augmentée du passé », c’est-à-dire dans le cas de l’entreprise : s’étendre, devenir big, too big ? Et Philip Clark de mentionner cette expression née du débat outre-Atlantique sur la régulation des banques – « Too big to fail is too big to exist » – et d’y voir une vraie question : « Too big to fail, do you exist ? ». Non pas tant sur un plan politique que sur celui de la performance de l’entreprise. Ainsi cite-il comme modèle le dynamisme des start-up qui doit beaucoup à leur petite taille et à leur organisation non hiérarchique où le seul fauteuil de direction est occupé par le projet lui-même. Sans compter que ce projet s’inscrit souvent comme une « réponse économique à une situation sociale, culturelle de la société contemporaine. » Réguler, stabiliser ou accepter et s’adapter ? Voilà une rencontre qui devrait nourrir le débat.

CV

L’Agilité ou la puissance du stratagème : le 23/10 à la Faculté d’Economie et de Gestion (110/114 La Canebière, 1er). 18h