Fusiphorm, l’homme des rencontres improbables… La nôtre pour commencer, au coin d’un bar. Un de ces lieux pour branchés où chaque personne présentée a automatiquement son prénom affublé d’un suffixe…
Fusiphorm, l’homme des rencontres improbables… La nôtre pour commencer, au coin d’un bar. Un de ces lieux pour branchés où chaque personne présentée a automatiquement son prénom affublé d’un suffixe, sorte de particule : « JP de Ventilo », « Tartenpion de … ». Pour Fusiphorm, ce fut juste Sylvain. Puis après quelques verres, lorsque l’éternelle question « que fais-tu dans la vie ? » pointa le bout de son nez rouge, le garçon de me répondre timidement : « de la musique, je suis à la tête d’un petit label… Il s’appelle Foundsound ». Gros blanc. Pendant lequel je me remémorais le week-end précédent, durant lequel un ami dj et moi, tous deux fans de longue date, attestions de l’effet euphorisant d’un maxi estampillé Foundsound sur un parterre de fêtards, fussent-ils mélomanes ou non… Une belle leçon de simplicité. Suivie, pendant l’interview qui servit de matière au présent article, d’un cours de… mathématiques (et de science du concept qui fonctionne, de la direction artistique qui tue). Scientifique de formation (il occupe un emploi dans la recherche), Fusiphorm transpose cette science glacée des chiffres à sa techno polaire (appelez-la minimale si cela vous chante). Et surtout, il trouve presque à chaque morceau (le monstrueux maxi Your space en atteste) la réponse à l’un des problèmes inhérents à ce genre de musique : atteindre le juste équilibre, l’équation parfaite entre dépouillement et rigueur d’un côté, efficacité et pouvoir évocateur de l’autre… Fusiphorm ? L’homme des rencontres contre nature. Poussant plus loin encore la réflexion qui le mène à créer des ponts entre arithmétique savante et musique dansante (adjectifs interchangeables), il expérimente ces temps-ci l’utilisation d’algorithmes, ces suites de calculs qui permettent la résolution d’un problème mathématique, dans la composition de morceaux qu’il qualifie « de plus en plus personnels ». A suivre, donc, sur ses prochains maxis annoncés cet été sur divers labels, et surtout sur le sien à l’automne. Et si la réponse à ses interrogations algébriques est « nous faire danser », Fusiphorm a en ce domaine ce que l’on appelle la science infuse. Si froide et millimétrique soit-elle, sa musique, jouée « live », fait mouche : adepte de vraies prestations (« il n’est pas question de faire un dj-set avec mes morceaux sur Ableton »), il y recrée, re-boucle, « re-dub » ses micro-samples récoltés, comme le veut la tradition Foundsound, sur des sources sonores diverses et variées. « Des sons recyclés », comme il aime à dire. Et ici, plus question de calculs : l’emballement incontrôlé de la machine, l’erreur, sont autant de « soucis » à l’heureux dénouement, aboutissant le plus souvent à de belles surprises sonores… Fusiphorm ? L’homme des rencontres heureuses : celle qui s’annonce vendredi soir avec le public de Marseille, sa ville d’adoption où il ne se produit pourtant que très rarement, est un moment qu’il attend sûrement autant qu’il redoute… Comme beaucoup ici-bas, il est surtout apprécié ailleurs, dans quelques patries du bon goût électronique (l’Allemagne notamment). La fuite des cerveaux inhérente au monde scientifique se propagera-t-elle jusqu’au monde de la techno ? Public marseillais, ressaisis-toi…
JPDC