Tehilim (Israël – 1h36) de Raphaël Nadjari avec Michael Moshonov, Limor Goldstein…
Marseille – New-York – Jérusalem : le parcours de Raphaël Nadjari est plutôt atypique. Le réalisateur a quitté très tôt les rives de la cité phocéenne pour tourner aux Etats-Unis ses trois premiers films dont le joli I’m Josh Polonski’s brother en 1999…
Marseille – New-York – Jérusalem : le parcours de Raphaël Nadjari est plutôt atypique. Le réalisateur a quitté très tôt les rives de la cité phocéenne pour tourner aux Etats-Unis ses trois premiers films dont le joli I’m Josh Polonski’s brother en 1999, mais c’est en Israël qu’il donnera naissance à son œuvre la plus aboutie — Avanim, l’histoire d’une femme qui cherche à s’émanciper d’un environnement familial étouffant. Le dernier long-métrage de Nadjari questionne une nouvelle fois l’identité d’une société israélienne partagée entre tradition et modernité, mais cette fois-ci à travers la vie d’une famille ordinaire, micro-société originelle et révélatrice des maux et des contradictions du monde juif dans son ensemble. La vie de cette famille demeure tout à fait banale jusqu’au moment, aussi surprenant que mystérieux, de la disparition du père à la suite d’un accident de voiture plutôt anodin : le fils aîné sort du véhicule pour aller chercher des secours et à son retour, son père n’est plus là. Drôle de séquence, drôle d’ambiance, le père s’est littéralement évaporé. Jamais larmoyant, et ne recherchant pas à résoudre la question du « pourquoi », Tehilim nous montre les réactions de la mère, des enfants et du reste de la famille face à cette absence. La mère, plutôt laïque, se heurte à l’orthodoxie religieuse de la famille de son mari disparu, et les enfants, au cœur du film, demeurent complètement déboussolés. La caméra, très près des corps, capte les gestes quotidiens de chaque personnage et tente de saisir ce qu’il y a de plus personnel dans les réactions de chacun. Le mouvement qui traverse le film pourrait ainsi être perçu comme un zoom placé au-dessus de la société israélienne : on y voit d’abord la société dans son l’ensemble, puis une famille, et enfin chacun des membres de cette famille. Suite d’équations rhétoriques insolubles (qu’est-ce qu’une famille sans le père ? Qu’est-ce qu’une société sans guide ?), Nadjari formule ici une belle proposition théorique sur les contradictions du monde juif actuel. Toutefois, le sérieux du sujet et l’absence « d’aérations narratives » font de Telehim un film dense où l’émotion est presque totalement absente, et il pourra apparaître un peu trop austère aux yeux de certains.
nas/im