Tous les Algériens sont des mécaniciens au Théâtre du Gymnase
Ma petite entreprise…
Programmé cette semaine au Théâtre du Gymnase, Tous les Algériens sont des mécaniciens de Fellag se veut une métaphore sur l’état de l’Algerie d’aujourd’hui et les interminables astuces qui permettent de survivre et d’en rire.
Fellag est né en 1950 dans un village de Kabylie. Il a donc, quelque part, toujours été en décalage avec les autorités de son pays et la concentration du pouvoir par les Algérois. Il étudie à l’Institut National d’Art Dramatique d’Alger de 1968 à 1972, s’exile au Canada de 1978 à 1981 pour revenir en Algérie en 1985 où il crée ses premiers one-man-show, avant de repartir en 1995. Pourquoi l’Algérie, vue d’ici, nous fait peur ? Parce qu’elle nous apparaît ingérable, comme débordée par sa jeunesse qui, dans un ras-le-bol incessant d’un avenir sans espoir, aurait décidé de se rebeller à l’infini. Pourtant, quand on y vit, on découvre une solidarité qui n’existe nulle part ailleurs et chaque problème devient le lieu de retrouvailles et de coups de main qui renforcent l’appartenance à une rue, à un quartier. A Oran, on peut se fâcher avec son frère, mais certainement pas avec son voisin, parce que celui qui est le plus proche de vous, physiquement, fait aussi partie de votre famille. L’Algérie, c’est une société ouverte au sens où l’on ne se terre pas chez soi, parce que le confort y est trop souvent dérisoire et la fraternité, le premier des bonheurs. Le riche s’habille en pauvre et le pauvre n’a pas à se justifier. Dans l’anarchie de la terreur et les mensonges du pouvoir, l’homme renaît toujours de ses cendres, il s’accommode d’être encore debout et il invente à l’infini l’espoir de vivre. Fellag vit en France, mais il connaît l’Algérie par son intérieur et ses détours, dans son quotidien et son avenir. Il ne porte pas la parole du résistant ou du combattant, il utilise l’humour et le particulier d’une famille pour remonter les incohérences d’un pouvoir miné par la corruption et les promesses jamais tenues. Tous les Algériens sont des mécaniciens est une manière subtile de reconstituer la démocratie au-dessus du capot d’une voiture, là où chacun est libre de s’exprimer et d’y aller de son point de vue, jouant du désaccord avec l’autre dans le bonheur d’être tous ensemble et d’apprécier la difficulté da sa vie par le souci des autres.
Karim Grandi-Baupain
Tous les Algériens sont des mécaniciens : jusqu’au 9/05 au Théâtre du Gymnase.
Rens. 04 91 24 35 24