Toutes les filles pleurent (France – 1h30) de et avec Judith Godrèche, avec Eric Elmosnino, Maurice Barthélémy…
Cry Baby
La curiosité naturelle du cinéphile fureteur justifierait à elle seule d’aller jeter un œil à la première réalisation de Judith Godrèche, actrice au parcours cinématographique initialement plus que prometteur mais de plus en plus litigieux. Que celle qui fut révélée par Doillon en 1989 dans La Fille de quinze ans, magnifiée par Jacquot (La Désenchantée), tourmentée par Assayas (Une nouvelle vie) ou encore célébrée par Leconte (Ridicule) décide de passer derrière la caméra pouvait paraître légitime. Hélas, trois fois hélas, Godrèche n’a visiblement conservé qu’un vague souvenir de ses fréquentations et de ses expériences dans le cinéma d’auteur. En effet, il aurait fallu lui rappeler que la lenteur, les plans rapprochés, les temps morts, la photographie, les silences ou même la direction d’acteurs n’existent pas dans la grammaire filmique que pour être sottement appliqués ou récités. Faire un film — aussi académique soit-il — requiert un assortiment d’idées minimal allié à un savoir-faire de circonstance qui donnent de la teneur à un scénario. Or, dans ce Toutes les filles pleurent — dont le titre reste par ailleurs une énigme puisque personne ne verse la moindre larme —, rien n’a de justification et ce, à tous les niveaux. Ni la grossière psychologie des personnages, ni les péripéties balourdes (chapeau à la séquence d’introduction où l’on découvre que Godrèche et Elmosnino ont une liaison) ou les dialogues déconcertants accompagnés par la musique geignarde d’un Julien Doré guère brillant ne sortiront les spectateurs d’une torpeur confondante et écrasante. A l’évidence, assister jusqu’au bout à un tel simulacre de film frise l’exploit, un exploit qui sera, on l’espère, relevé par peu d’idéalistes…
Lionel Vicari