Vivants par Lou Grenier

Vivants de Mehdi Charef

 

 

Le bidonville de Rue des pâquerettes est détruit. Désormais, il faut vivre dans les petites baraques de la cité de transit. Avec Vivants, Mehdi Charef écrit, sous forme de bribes de souvenirs constellés, un nouveau volet de son enfance.

 

Dans ce deuxième tome de sa trilogie autobiographique parue chez les éditions marseillaises Hors d’atteinte, l’auteur fait se croiser des souvenirs d’une Algérie qui prend le large avec des instants vécus d’une France peu accueillante. L’enfant qu’il est alors observe les chassés-croisés des générations, des rencontres incongrues, de la barrière de la langue. Il nous fait vivre des naissances, des blessures, des fêtes, des tentatives d’arnaques, des fuites de l’ennui. Une galerie d’évènements aussi furtifs que marquants formant la vie et son lot d’émotions.

Cependant, le provisoire précaire s’éternise, les souvenirs s’y entassent. Premier écrivain d’origine algérienne à écrire un roman en France, Mehdi Charef est âgé de dix ans quand il arrive à Nanterre. Balloté dans le jeu des politiques de logement, il est relogé avec sa famille en cité de transit dans l’expectative d’une place en HLM.

Les deux ans d’attente annoncés tournent en neuf longues années. Seule compensation donnée à ces familles en ballotage : l’eau courante.

Un sentiment paradoxal traverse le récit. S’y côtoient la crainte, la honte face à la réalité des inégalités et la possibilité d’avoir de l’espoir en l’avenir — notamment en comprenant que l’école peut permettre de s’émanciper d’un avenir tout tracé en direction de l’usine.

L’enfant devenu grand écrit. En racontant son quotidien, il lui confère une galerie de visages vivants envers et contre tout. Les inscrivant ainsi avec dignité dans une mémoire collective.

 

Nadja Grenier

 

Mehdi Charef – Vivants (Éditions Hors d’atteinte)

Rens. : http://www.horsdatteinte.org/produit/vivants/