Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline au Théâtre du Gymnase
A la vie, à la mort
Portant sur scène le Voyage au Bout de la Nuit de Céline, Françoise Petit met en valeur des morceaux choisis du roman grâce à une mise en scène épurée, permettant au spectateur de se laisser emporter.
Le roman traverse le début du XXe siècle via le regard de Bardamu, l’anti-héros d’une œuvre grandement autobiographique, ici incarné par Jean-François Balmer.
La langue de Céline est haute en couleurs, truffée d’expressions improbables, de métaphores bluffantes. C’est un pari d’envergure d’adapter ce texte au théâtre sans lui faire perdre son âme et le pouvoir évocateur de ses mots. C’est avec plaisir que l’on écoute la voix rocailleuse de Jean-François Balmer nous faire vivre, avec une gouaille toute parisienne, les aventures de Bardamu. Il incarne tous ses âges dans un monologue de plus d’une heure et demie, une performance d’acteur impressionnante compte tenu de la complexité émotionnelle du texte. L’acteur, qui occupe l’espace scénique avec charisme, campe presque à lui seul les décors. Le texte riche de descriptions permet une scénographie plus allusive que décorative. Seul le ciel, projeté sur un écran à l’arrière-scène, change selon les séquences et varie de couleur, d’intensité. La structure du roman est conservée, se divisant en quatre saisons : la Grande Guerre, l’Afrique, New York et Rancy, minable banlieue parisienne. Nous faisant passer de la boue grise des tranchées à l’orange brûlé de l’Afrique, Bardamu est tour à tour soldat, colon, expatrié puis médecin de quartier, mais toujours étranger. C’est le récit d’une vie décalée, toujours en quête de sens, d’explication devant les absurdités du siècle. Mais au-delà de la vie, la grande inspiratrice du Voyage au bout de la nuit, d’après Jean-François Balmer, c’est pourtant la mort.
Adèle de Keyzer
Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, mis en scène par Françoise Petit, avec Jean-François Balmer, était présenté du 8 au 12/04 au Théâtre du Gymnase